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Au Japon, le matcha - « mousse de jade liquide » - est associé depuis des siècles à la cérémonie du Cha No Yu. De plus en plus connu, il fait des émules notamment pour ses vertus culinaires et ses caractéristiques aromatiques hors du commun…
- Article extrait du magazine Bruits de Palais 54 - page 5 -
Bien que la légende fasse remonter la consommation du thé en Chine à deux mille ans avant notre ère, elle s’est surtout répandue sous la dynastie des Tang (618-907 ap. J.-C.). A l’époque, le thé n’était pas consommé infusé mais réduit en poudre et battu dans l’eau chaude.
C’est sous cette forme que le thé vert fut rapporté de Chine par le moine bouddhiste Eisai et diffusé dans les hautes sphères de la société japonaise à partir du XIIème siècle. Si la consommation de thé vert en poudre déclina en Chine pour progressivement disparaître, son usage se répandit au Japon.
Au XIIIème siècle, les guerriers samouraïs et les moines commencèrent à préparer et à boire du matcha. Un rituel s’esquisse alors sous la forme du wabi (littéralement, « raffinement sobre et calme »), caractérisée par l'humilité, la contrainte, la simplicité, la profondeur, l'imperfection et l'asymétrie. Au XVIème siècle, le prêtre zen Sen-no Rikyu codifie les rapports entre le thé, le bouddhisme et les différentes écoles de thé, donnant au Cha No Yu, la cérémonie du thé japonaise, sa forme la plus accomplie. Il introduit notamment le concept de ichi-go ichi-e, (« une fois, une rencontre »). Cette conception selon laquelle chaque rencontre est considérée comme un trésor qui ne pourra jamais se reproduire est toujours d’usage au Japon actuellement. La codification de la cérémonie du thé continue d’être enseignée dans les écoles formant les maîtres de thé et ce savoir se passe de génération en génération.
Le matcha est, à plus d’un titre, une spécificité de l’archipel nippon. Au Japon, où les récoltes sont aujourd’hui le plus souvent mécanisées, le matcha est l’un des seuls thés dont la récolte manuelle persiste pour les meilleures qualités. Le matcha fait partie de la catégorie des thés de l’ombre, comme le gyokuro (voir Bruits de Palais 45). Trois semaines avant la récolte, qui a lieu une fois par an au printemps, on prive les théiers de lumière, ce qui permet aux feuilles de développer des propriétés caractéristiques. Cet ombrage, qui filtre 80% à 90% des rayons du soleil, a pour conséquence d’accroître la photosynthèse de la feuille qui prend alors une nuance plus sombre. Le théier, privé de lumière, puise énormément de nutriments par ses racines et les composés aromatiques de ses feuilles sont modifiés ; alors que la proportion de sucres, d’acides aminés et de caféine augmente, les catéchines (type de polyphénols) diminuent. Les feuilles ainsi récoltées subissent, comme bon nombre de thés verts japonais, une torréfaction très particulière, à l'aide de vapeur d'eau. Ce processus, très court, préserve les qualités originelles de la feuille fraîche : les composés aromatiques sont très peu altérés et se retrouvent pour bonne partie dans le thé une fois manufacturé. En cela et du point de vue japonais, l’étuvage est une technique considérée comme plus harmonieuse car plus respectueuse de la nature de la feuille. A la différence du gyokuro, on retire les nervures et les tiges pour ne garder que les feuilles (tencha). Les feuilles, quant à elles, sont passées dans deux meules traditionnellement en pierre. Du temps de passage entre les meules dépend la finesse du matcha produit. Toute cette étape est faite à l’abri de la chaleur, avec un degré d’hygrométrie contrôlé, afin de ne pas noircir ou agglomérer cette poudre si fine. L’opération d’ombrage, le passage du thé entre les deux meules et le résultat obtenu qu’est la finesse de la mouture, sont autant de caractéristiques qui différencient le matcha d’un thé vert réduit en poudre. Le goût du matcha, après toutes ces opérations, est plus fin, plus prononcé et plus végétal que de la poudre de thé vert. La poudre du matcha est aussi plus légère et fragile ; elle doit être conditionnée dans des sachets puis des boîtes métalliques, hermétiques à la lumière, aux odeurs et à l’humidité. Aujourd’hui, ces boîtes sont d’une contenance de 40 grammes, mesure métrique proche de dix monme, ancienne mesure traditionnelle japonaise (soit environ 37,5 grammes). Cette quantité était jugée idéale pour préparer 20 bols de usucha (« thé léger ») ou 10 bols de koïcha (« thé épais »). Les Maîtres de thés commandaient leur thé selon cette mesure. L’usucha est fabriqué à partir de théiers âgés entre 3 et 20 ans. On fabrique le koïcha à partir de théiers de plus de 30 ans (en moyenne, il s’agit de théiers de 70 ans !).
Le matcha est un ingrédient indispensable à la cérémonie japonaise du Cha No Yu (littéralement « eau chaude pour le thé »).
Cet art de préparer le thé s’est développé à partir du XVIème siècle et va bien au-delà de l’art de vivre. C’est une réelle philosophie où le but est de toujours s’améliorer dans Sado, la « Voie du Thé ». Cha No Yu repose sur quatre piliers : Harmonie, Respect, Pureté et Tranquillité qui est la synthèse des trois précédents. L’harmonie, à la différence de la perfection, célèbre la dissymétrie. L’hôte choisit avec attention la composition florale, la calligraphie et les accessoires afin de célébrer un moment qui sera forcément unique car impossible à répéter à l’identique. Voici aussi pourquoi, par exemple, les accessoires de Cha No Yu sont souvent « dépareillés » au sens Occidental du terme : les bols en raku sont rugueux et tous réalisés dans des céramiques de différentes couleurs. Le respect se retrouve dans l’admiration des convives pour les objets de la cérémonie et pour les marques de politesse que convives et hôte se témoignent. Le but ultime de l’hôte est de permettre une communion spirituelle et esthétique. La pureté est présente dans le fait que l’hôte nettoie les ustensiles devant ses invités et la liqueur verte du matcha est le symbole du renouveau. Enfin, la tranquillité peut être atteinte car Cha No Yu a lieu dans un pavillon au décor volontairement dépouillé et réservé à cet usage. Le vide de la pièce est rempli de la vie vécue ensemble, entre l’hôte et ses quatre invités (tout au plus).
En plus d’avoir joué un rôle prépondérant dans le développement de l’architecture, des arts paysagers, floraux ou encore décoratifs, l’étiquette minutieuse observée lors de la cérémonie a influencé fondamentalement le savoir-vivre japonais, et l’art séculaire du Cha No Yu demeure aujourd’hui l’une des clés d’accès à la compréhension de la société japonaise. Concernant le déroulement proprement dit de la cérémonie, elle débute par une collation légère – le Kaiseki – puis, après une courte pause, se poursuit avec le Goza Iri, moment central de la cérémonie, au cours duquel on sert d’abord le thé épais (koïcha) puis le léger (usucha). Souvent, on se contente du usucha, dont le rituel ne dure que 60 minutes, alors que certaines cérémonies peuvent requérir 4 heures...
Après diverses purifications et civilités d’usage, l’hôte frappe cinq coups sur un gong, et, au terme d’un enchaînement de gestes minutieux, il verse 3 cuillerées de matcha dans un bol (chawan), puise une louche d’eau chaude et bat la mixture avec un fouet en bambou jusqu’à obtenir une consistance épaisse. L’invité d’honneur s’approche à genoux du bol, posé près du foyer, boit trois gorgées et complimente l’hôte. Puis il essuie l’endroit du bol qu’ont touché ses lèvres avec le papier (kaîchi) qu’il a apporté avec lui et passe le bol au second invité, qui procède de même, et ainsi de suite. Le dernier rend le bol au premier qui le tend à l’hôte. Les cinq sens sont en éveil lors de Cha No Yu afin d’atteindre le Sado. Le goût et l’odorat sont principalement sollicités lors de la dégustation du matcha amer, « rééquilibrée » par une pâtisserie généralement sucrée. La vue est mise à contribution car les invités peuvent admirer la composition florale et le kakemono (toile pendue) orné d’une calligraphie ou d’une peinture. Les convives apprécient également l’ambiance calme et feutrée qui règne dans la pièce et qui repose du bruit et de l’agitation extérieurs. Toucher le bol à matcha en céramique, rugueux, est aussi un plaisir simple qui permet une expérimentation sensorielle du Sado.
Le matcha va de pair avec la cuisine puisqu’au cours de Cha No Yu, il y a toujours une collation légère – le Kaiseki. Le matcha s’est progressivement diffusé dans la gastronomie japonaise, sucrée comme salée, car il constitue un colorant ou un arôme naturel idéal.
L’une des utilisations les plus courantes est la crème glacée au matcha, cela peut être une glace à la vanille saupoudrée de matcha ou une préparation à base de crème dans laquelle le matcha est directement incorporé ; la glace est alors d’un beau vert printanier. On trouve encore les granités Kaki-gôri. Les sirops utilisés pour agrémenter la glace pilée sont innombrables, mais le granité Ujikintoki au matcha, est très apprécié des japonais et il n’est pas rare de voir des marchands ambulants de Kaki-gôri en été. On peut trouver du matcha dans les préparations sucrées à l’azuki (un haricot rouge ou blanc) qui sert notamment de base aux wagashi (« pâtisseries japonaises »). Le renouveau lié au printemps tient une grande place dans la culture japonaise si bien que de nombreux wagashi de printemps sont verts et en partie au matcha comme le Miyako no Haru (« Printemps dans la Capitale ») ou le Hikichigiri (wagashi rose et vert célébrant le Hina Matsuri, fête des filles, au mois de mars). Le matcha se retrouve aussi en utilisation salée comme condiment mélangé au sel.
En Occident, depuis la fin des années 1990, une utilisation en cuisine vient directement de la tradition japonaise. Si au départ le matcha a surtout été associé à des préparations sucrées, il est de plus en plus courant de le voir sur un accord de plat salé. Le matcha pâtissier est particulièrement approprié pour un usage en cuisine et possède sur le plan gustatif des qualités similaires au matcha de cérémonie. Grâce au fait d’avoir été privé de lumière et à sa forte concentration en acides aminés, le matcha gagne en moelleux et en finesse ; il développe moins d’amertume et sa saveur umami est plus marquée. Apporter la saveur umami (« délicieux », en japonais) peut être particulièrement intéressant car elle renforcera la ou les saveurs (salée, sucrée, amère, acide) déjà présentes dans le plat. Cette cinquième saveur est engendrée par une association de substances naturelles, dont l'acide glutamique communément appelé glutamate (un acide aminé), que l’on retrouve dans certains poissons gras tels que le maquereau ou la sardine, dans la sauce de soja, mais aussi dans le fromage, la viande ou encore le lait maternel. Ajouté à des préparations culinaires, le glutamate est un exhausteur de goût : des expériences ont montré que les aliments additionnés de glutamate avaient un goût de « revenez-y ». En plus de la saveur umami, les notes apportées au plat pourront rappeler des notes puissamment végétales (cresson, oseille, épinard, pointes d’asperges vertes), iodées (algues) tirant même parfois sur le chocolat noir…
- Ce thé de cérémonie peut aussi être préparé un peu plus trivialement pour le plaisir de la dégustation. Dans un large bol bien sec (de préférence en raku), placez une cuillerée à café de matcha, si possible tamisée afin d’éviter les grumeaux. Versez dessus 15 cl d’eau frémissante et battez la mixture à l’aide d’un fouet d’un geste saccadé, en forme de « w », jusqu’à obtenir une mousse bien émulsionnée.
- On peut également préparer du matcha glacé : il suffit de procéder de la même manière et de rajouter des glaçons en fin de processus.
- Il n’est pas rare de trouver du matcha battu dans du lait chaud plutôt que dans l’eau, ceci donne un goût très prononcé au lait chaud.
Conseils pratiques : Une fois une recette au matcha terminée, il est recommandé de refermer hermétiquement le sachet ou la boîte et de conserver le matcha au réfrigérateur afin de préserver toutes ses qualités.
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