Le thé passe à table
Depuis sa création, Palais des Thés propose une approche gastronomique du thé. Boisson subtile, le thé accompagne merveilleusement un repas. Ingrédient étonnant, il peut aussi se cuisiner. Chefs et sommeliers sont d’ailleurs de plus en plus sensibles à ses nombreuses qualités. Témoignages et rencontres.
- Article extrait du magazine Bruits de Palais 74 - page 6 -
Chez Palais des Thés, on a toujours aimé comprendre le thé et le savourer dans toute sa diversité
s'enthousiasme François-Xavier Delmas, fondateur de la Maison.
Depuis plus de 30 ans, ce chercheur de thé expérimente, lors de ses voyages, tout ce qui est en lien avec sa boisson de prédilection, notamment la cuisine au thé. « Le thé est un véritable ingrédient. En Asie, il est utilisé traditionnellement dans de nombreux plats. J'ai toujours voulu initier les amateurs à cette approche du thé qui n'est pas, pour nous Occidentaux, un réflexe. C'est pourquoi nous avons très vite fait une place centrale aux recettes intégrant du thé dans notre magazine Bruits de Palais. Nous avons créé des gelées et des confitures au thé. Nous avons également développé des collaborations avec des Chefs renommés comme Sylvain Sendra, aujourd'hui couronné d'une étoile Michelin dans son restaurant Itinéraires. Quant à l'École du Thé, inaugurée en 1999, et le livre Tea Sommelier*, publié l'année dernière, ils sont également venus asseoir cette démarche gastronomique. » Et François-Xavier Delmas n'est pas près de s'arrêter en si bon chemin ! « Je rencontre les Chefs et les sommeliers du monde entier pour leur donner envie de servir du thé pendant les repas et pour les encourager à le cuisiner... » Une « mission » qui semble porter ses fruits : de plus en plus de professionnels mettent le thé à table...
La parole à trois Chefs Théophiles
HÉLÈNE DARROZE,
Chef des restaurants Marsan et Jóia à Paris et du Connaught à Londres

Utiliser le thé dans la cuisine, c’est un nouveau réflexe ?
Depuis plusieurs années déjà, le nom de Mae Salong nous faisait rêver. Coupures de presse, témoignages Pour moi qui bois peu d'alcool et qui adore la gastronomie japonaise, boire du thé est un réflexe. En revanche, comme ingrédient, je ne le travaille que ponctuellement. J’ai, par exemple, glissé un Darjeeling et un thé au jasmin dans les gelées de mes foies gras.
Comment avez-vous découvert le thé comme ingrédient ?
C'est mon Chef pâtissier, qui utilise parfois dans ses desserts les Darjeeling et le Genmaicha, qui a attisé ma curiosité...
Selon vous, pourquoi cuisine et thé font-ils bon ménage ?
Le thé offre une palette de saveurs qui se marient avec un grand nombre de produits. Je pense notamment aux thés verts avec leurs notes iodées qui doivent parfaitement se cuisiner avec des poissons.
FRANÇOIS PERRET,
Chef pâtissier du Ritz Paris

Le thé vous inspire-t-il ?
Oui ! Ce n'est pas un ingrédient classique de la cuisine et de la pâtisserie françaises mais, en revanche, c'est un produit qui m'intrigue, m'inspire et que j'utilise de plus en plus souvent.
Quand avez-vous commencé à utiliser le thé en pâtisserie ?
Je me suis tout particulièrement intéressé au thé dans les années 2010 lorsque j'étais Chef pâtissier du Shangri-La à Paris. Ce cinq étoiles appartient à un groupe hôtelier de luxe d'Asie Pacifique. Le thé a attiré mon attention car il était en lien avec l'histoire de la Maison. De plus, le thé s'inscrit particulièrement dans la pâtisserie d'aujourd'hui où le sucré ne doit pas dominer les autres produits. Le thé permet de respecter cet équilibre. L'amertume d'un thé noir, le côté herbacé d'un thé vert temporisent bien le sucre.
ASHFER BIJU,
Chef du restaurant The Pierre à New York

Cuisiner avec le thé, est-ce une grande nouveauté, une nouvelle tendance ou bien une démarche naturelle dans la cuisine gastronomique ?
C’est, en tout cas, une nouvelle tendance en Occident car le thé va naturellement de pair avec la gastronomie. Malheureusement, les Chefs comme les sommeliers n’ont pas été suffisamment formés à son usage. Cela a limité son utilisation. Aujourd’hui, c’est en train de changer car les professionnels ont de plus en plus l’occasion de goûter de grands thés, ce qui les inspire.
Comment avez-vous découvert le thé comme ingrédient ?
Je suis né et j’ai grandi en Inde, plus précisément dans la région du Kerala. Le thé est donc, pour moi, une forme d’art de vivre. J’ai appris très jeune à l’apprécier. Je me souviens bien de la première fois où je l’ai utilisé. C’était à l’école de cuisine. J’ai poché un poisson dans un bouillon au thé et au gingembre. Le résultat n’a pas été très probant. Peut-être parce que je n’étais pas encore un bon cuisinier ? Cependant, je me souviens parfaitement des arômes qui s’échappaient de la casserole pendant que mon plat mijotait. Ils m’ont profondément marqué et j’ai su que je tenterais de nouvelles expériences avec le thé.
Selon vous, pourquoi cuisine et thé font-ils bon ménage ?
Ils sont, tous deux, intimement liés à l’histoire de la gastronomie. Les grandes civilisations asiatiques ont toujours proposé du thé lors des repas. Dans de nombreuses cultures, le thé est un ingrédient et ses feuilles sont utilisées comme des herbes aromatiques. Vert, noir, parfumé avec des fleurs… Sa palette aromatique est immense. Elle est idéale pour des Chefs en quête de créativité.